Les différents établissements pénitentiaires

Il existe en France différents types d’établissements pénitentiaires dans lesquels les détenus sont répartis en fonction de leur situation pénale. Les établissements les plus nombreux, les Maisons d’Arrêt, n’accueillent par exemple que des détenus en attente de jugement, les condamnés à des courtes peines (moins de 2 ans) et ceux ayant de courts reliquats de peine à purger. 

Mais au-delà des différences selon le type d’établissement, de grandes différences existent entre les prisons françaises : certaines sont très anciennes et vétustes, construites dans des châteaux ou d’anciens couvents, produisant des conditions de détention très dégradées. D’autres ont été construites très récemment et appliquent les nouvelles normes en vigueur, parfois jugées trop sécuritaires et déshumanisantes.  Certaines prisons sont bien intégrées au tissu urbain et accessibles en transport pour les proches et la famille. D’autres sont situées en périphérie des ensembles urbains et bien moins accessibles à d’éventuels visiteurs. 

Les prisons évoluent aussi au cours des décennies, et se dégradent souvent. Alors que Fleury-Mérogis est aujourd’hui l’une des prisons les plus problématiques en France, l’Express lui consacrait par exemple un article laudateur à son ouverture en 1968.

Typologie des établissements pénitentiaires

Répartition du nombre de détenus selon le type d’établissement en France

Ce tableau présente la répartition du nombre et du pourcentage de personnes écrouées détenues (65524 au total au 1er janvier 2020) en fonction des différents types d’établissement pénitentiaire en France existant en 2023.

Début 2023, la France compte 187 établissements pénitentiaires, dont 84 Maisons d’Arrêts (45% des établissements) ainsi que 53 Centres Pénitentiaires qui comptent eux-mêmes souvent un quartier maison d’arrêt. 

Les CP concentrent près de 45% des détenus, ce qui indique que près d’un détenu sur deux est hébergé dans un établissement où des profils de détenus divers coexistent (comme des prévenus en attente de jugement en quartier maison d’arrêt et des longues peines en quartier centre de détention).

A eux deux, les MA et les CP hébergent plus de 80% des détenus en France. C’est dans ces deux types d’établissement que se concentrent tous les problèmes de surpopulation carcérale.

Les autres types d’établissements, comme les Centres de Détention ou les Maisons Centrales sont beaucoup moins nombreux et concernent moins de 20% des détenus.  

Peines de prison et type d’établissement pénitentiaire

 Les Maisons d’Arrêt  

Les maisons d’arrêt sont prévues pour recevoir les personnes en détention provisoire, c’est-à-dire non encore condamnées et présumées innocentes. Ces dernières ne figurent donc pas sur le graphique présenté. Les maisons d’arrêt peuvent également recevoir des personnes dont la peine ou le  reliquat de peine n’excède pas deux ans. Le graphique ci-dessous montre effectivement que la plupart des condamnés incarcérés en maison d’arrêt le sont pour des peines inférieures à un an. 

Les Centres de détention  

Un centre de détention est un établissement pour peines, qui reçoit les détenus condamnés en général à plus de deux ans de prison mais qui présentent les perspectives de réinsertion sociale les meilleures. 

Les maisons centrales

Une maison centrale est un établissement pour peine qui reçoit les détenus les plus lourdement condamnés. Le régime de détention se concentre sur la sécurité. Le graphique ci-dessous montre en effet que l'écrasante majorité des détenus incarcérés en maison centrale ont été condamnés à des peines supérieures à trois ans de prison. Certaines détenus incarcérés en maison centrale le sont pour des peines moindres : il s'agit souvent de détenus particulièrement signalés, nécessitant une sécurité accrue ou ayant déjà tenté de s'évader par exemple. 

Les centres pénitentiaires 

Un centre pénitentiaire est un établissement pour peine, qui rassemble au moins deux quartiers pénitentiaires différents : par exemple une maison d'arrêt, un centre de détention et une maison centrale. Le graphique ci-dessous montre bien que la répartition des peines de prison est équilibrée chez les détenus incarcérés en centre pénitentiaire. 

Les centres de semi liberté

Les centres de semi-liberté reçoivent des détenus au régime de la semi liberté ou du placement extérieur. Ils peuvent ainsi quitter l'établissement pénitentiaire dans la journée, pour des activités ayant pour objectif une réinsertion (travail, formation) et dorment au sein de l'établissement pénitentiaire. 

Les établissements pénitentiaires pour mineurs 

Les établissements pour mineurs accueillent des détenus n'ayant pas encore atteint l'âge de dix-huit ans. 

Les unités hospitalières

Il existe deux types d'unités hospitalières : les unités hospitalières spécialement aménagées, qui reçoivent les hospitalisations psychiatriques (UHSA) et les unités hospitalières sécurisées interrégionales pour des hospitalisations programmées dont la durée dépasse les 48h (UHSI). 

 De quand datent les établissements pénitentiaires en France  ? 

 De quand datent les établissements pénitentiaires en France  ? 


De quand datent les prisons françaises ?
 La carte de gauche présente les dates de constructions (ou de conversion du bâtiment d'origine en prison) des établissements pénitentiaires français, pour la France métropolitaine. Les prisons les plus anciennes qui accueillent encore des détenus aujourd'hui datent d'avant le XIXème siècle. La maison d'arrêt de Gap date par exemple de 1790. 

La date de construction d'un établissement n'est pas anodine pour cerner les disparités pouvant exister dans les prisons françaises. Une prison construite au XIXème siècle ou avant est souvent, de fait, plus frappée par des enjeux de vétusté. C'est le cas de la maison d'arrêt de Colmar, aménagée en prison en 1791 dans un bâtiment datant du XIVème siècle. La construction ne permet pas de séparer les détenus, en fonction de leur peine, ou encore de les isoler par mesure de sécurité. L'établissement, frappé par des soucis de surpopulation et de manque d'hygiène, ferme ses portes en 2021. 

Une date ancienne de construction (ou d'aménagement du bâtiment) a néanmoins souvent un avantage en termes de localisation : les  vieux établissements pénitentiaires sont souvent construits proches des centres villes, voire même adjacents aux tribunaux. L'accès à l'établissement pour les visiteurs est donc facilité. Les prisons datant du XXème ou du XXIème siècle sont souvent construites à l'écart du centre-ville, en marge sociale et géographique de la commune la plus proche. Enfin, une prison ancienne accueille souvent un nombre de détenus réduit, ce qui peut constituer un avantage vis-à-vis des nouveaux centres pénitentiaires très grands et parfois très automatisés et déshumanisants.

La prison de la Santé, à Paris, date de 1967. Elle présentait l'avantage important de se retrouver dans le centre ville de Paris, mais l'inconvénient de la vétusté. Elle a été fermée pendant quatre ans pour rénovation avant de réouvrir ses portes en janvier 2019. 

En France, le système pénitentiaire compte près de 185 établissements se situant souvent en centre-ville ou proches de grandes villes. Pour autant, d'autres prisons sont plus éloignées voire isolées des grands centres urbains, notamment du fait de la disponibilité des terrains. 

De plus, les choix d'affectation des détenus dans un établissement pénitentiaire plutôt qu'un autre répond à plusieurs contraintes (en particulier la nature de la détention, la durée de la peine, et le nombre de places disponibles) qui peuvent éloigner les détenus de leur lieu de résidence. 

En conséquence, un détenu peut être incarcéré loin de sa famille (c'est particulièrement le cas des femmes, puisque les prisons pour femmes sont peu nombreuses).

Cette carte montre la distance en kilomètre entre un établissement pénitentiaire et la préfecture de son département en France.

Pour mesurer cet isolement géographique qui peut être facteur d'isolement social des détenus (difficulté de visite des familles et des associations notamment), nous calculons ici la distance de chaque prison à la préfecture du département dans lequel elle se trouve. 

La carte ci-contre représente les différentes distances kilométriques séparant chaque établissement pénitentiaire à la préfecture de son département (distance par la route, selon Google Maps). Dans le département des Bouches-du-Rhône par exemple, à peine 10 km séparent le CP des Baumettes ou l'EPM de la Valentine de la préfecture, tandis que le CD de Tarascon est éloigné de 112 km. La distance moyenne est de 44,3km.

Au total en France, la distance prison-préfecture est de 24,6km en moyenne, mais la médiane atteint 50,3 km ce qui traduit bien un certain isolement par rapport aux villes principales. 

La distance géographique entre les établissements pénitentiaires et les villes peut rendre plus difficile l'accès des proches et des associations qui interviennent en prison (enseignement, culture, prévention des risques, activités de réinsertion, etc.). Ces difficultés d'accès en transport sont illustrées sur les cartes ci-dessous, pour les départements des Bouches du Rhône et du Pas-de-Calais notamment. 

La carte ci-contre récapitule la distance et le temps nécessaires pour  atteindre différents établissements pénitentiaires du département depuis la préfecture des Bouches du Rhône, Marseille. Le temps de voyage a été calculé en transport en commun, puisqu'on ne peut pas faire l'hypothèse que les familles et les proches de détenus disposent tous de voiture pour se rendre dans un établissement pénitentiaire. L'établissement le moins enclavé, le centre pénitentiaire des Baumettes, est accessible en métro et bus au sein même de la ville de Marseille. Le centre pénitentiaire d'Aix-Luynes, et à fortiori le centre de détention de Salon de Provence sont eux plus éloignés de la préfecture. Ils sont accessibles par autobus (deux changements de car à effectuer). Enfin, le centre de détention de Tarascon est accessible par TER puis par autobus. La durée de trajet, ainsi que son prix peuvent être un obstacle pour les familles désireuses de rendre visite aux détenus. 

 

Le constat est le même pour le département du Pas-de-Calais, avec des disparités en termes de distance peut-être encore plus renforcées. La maison d'arrêt d'Arras est située à proximité immédiate du tribunal, en plein cœur du centre ville. Il en est différemment pour le centre de détention de Bapaume, ou le centre pénitentiaire de Longuenesse. Pour des familles de détenus résidant à Arras, ces établissements ne sont accessibles qu'en TER puis en bus, et impliquent de payer des sommes allant jusqu'à une vingtaine d'euros. 

L'Île-de-France présente l'avantage d'être sensiblement mieux desservie en transport en commun que le reste du pays. Ci-contre est présentée la distance à effectuer entre la préfecture de Paris et différents établissements de la région (et non plus du département, comme c'était le cas pour les deux cartes précédentes). L'ensemble des trajets sont disponibles en transport en commun, sans train TER. Aucun d'entre eux n'excède deux heures, même pour des trajets interdépartementaux. L'avantage de l'accessibilité en transports en commun doit être relativisé par la surpopulation très présentes dans les prisons d'Île-De-France. Ainsi, des détenus originaires de la région se voient écroués ailleurs en France, faute de place. La distance avec la famille s'accroit en conséquence. 

Pour aller plus loin

En France

Article de Libération "Nouvelles prisons : ultramoderne solitude" https://www.liberation.fr/societe/2010/02/16/nouvelles-prisons-ultramoderne-solitude_610271/ 

Milhaud, O. (2009) "Séparer et punir. Les prisons françaises : mise à distance et punition par l'espace (Thèse, Université Michel de Montaigne-Bordeaux III) 

A l'étranger

Gaes et Camp : "Unintended consequences : Experimental evidence for the criminogenic effect of prison security level placement on post release recidivism" Journal of Experimental Criminology 5, 2009, pp 139-162

Chen MK and Shapiro JM "Do harsher prison conditions reduce recidivism ? A discontinuity-based approach"  American Law and Economics Review  (2007) pp 1-29

Bedard et Helland (2004) "The location of women’s prisons and the deterrence effect of "harder" time." International Review of Law and Economics 24 (2), 147–167

Weber (2020) "The big house far from home : Spatial Distance and Criminal Recidivism"